Que vous soyez auteur ou non, vous connaissez sûrement le principe de la procrastination active. Mais si, vous savez, le moment où on n’a tellement pas envie de remplir sa déclaration d’impôts qu’on décide de faire le ménage pour repousser le moment de s’y mettre (ou l’inverse).
Ce principe s’applique bien évidemment à l’écriture : tous les prétextes sont bons pour délaisser un texte récalcitrant. Dans certains cas, la ficelle est grosse : une envie soudaine de s’attaquer à sa comptabilité plutôt qu’à ses corrections, c’est louche (gros avantage quand même : ça règle le problème de la comptabilité). D’autres stratégies sont plus subtiles, il m’a fallu quelques années pour apprendre à les reconnaître. Petit florilège de mes procrastinations actives les plus fréquentes :
Stratégie 1 : les questionnements existentiels.
C’est le grand classique des premiers jets. J’avance tranquillement dans ma rédaction, et là, paf, un gros doute. Est-ce que le texte ne serait pas mieux si je le réécrivais à la première personne ? Est-ce que ces deux scènes ne gagneraient pas à être inversées ? Et ce personnage, il ne faudrait pas le remplacer par un autre dans les chapitres déjà écrits ?
D’expérience, ces questions sont des leurres : quand j’arrive à les ignorer et que je parviens au bout du texte, les modifications en question ne me paraissent plus si importantes (voire même semblent peu pertinentes). Elles représentent seulement un moyen de détourner Muse de ce qui lui fait peur : le prochain chapitre à écrire.
Stratégie 2 : la planification exacerbée.
Celle-là, en général, elle se manifeste dans les semaines qui précèdent l’écriture d’un premier jet : Muse craint que le roman rende moins bien par écrit que dans ma tête et fait diversion. Les symptômes sont assez variés, voici quelques exemples :
- fignoler le rendu couleur de ma carte du monde (celle qui n’a pas vocation à être publiée et me sert juste à vérifier que je reste cohérente sur les distances). Puis chercher des noms de capitale aux pays si éloignés qu’ils ne seront même pas cités dans le roman.
- mettre à jour mes fiches de personnages en réfléchissant aux détails de l’enfance de mes personnages tertiaires (ceux qui n’apparaissent qu’une fois dans le texte).
- réfléchir à laquelle des deux lunes de mon monde est la plus éloignée, en tenant compte de leurs périodes de révolution et des lois de Kepler pour l’astronomie. Non, il n’y a aucune éclipse dans le roman, pourquoi ?
Stratégie 3 : la lecture de conseils à outrance.
Internet regorge de ressources sur l’écriture, entre les blogs d’auteurs, les masterclass et les podcast de conseils. Je ne parle même pas des manuels de dramaturgie disponibles en bibliothèque ou en librairie… Ah, et vous vous souvenez des forums d’écriture que je vous avais vantés dans mon article du mois dernier ? C’est un super moyen de progresser, mais aussi un puits sans fond de procrastination. On passe vérifier un truc et avant d’avoir le temps de comprendre ce qu’il se passe, on se retrouve à lire des débats enflammés sur les différentes méthodes de correction, l’auto-édition ou la pertinence de l’orthographe réformée…
Tout ça pour dire : un peu, c’est bien, mais si vous passez plus de temps à lire des conseils qu’à écrire, c’est louche !
Stratégie 4 : l’écriture de posts de blog.
L’envie est récurrente chez moi quand je manque d’inspiration sur mes textes, d’autant plus que j’ai une liste longue comme le bras de chouettes thèmes à traiter. Mais on va dire que c’est pour la bonne cause…
Hein, quoi, le roman que je suis censée planifier en ce moment ? Promis, j’y retourne !
Bien entendu, ces stratégies de procrastination ont parfois des raisons d’être. Inutile de s’acharner sur un texte qui ne nous fait plus envie, d’autant plus si on a le nez dessus depuis plusieurs mois : il est important de savoir faire des pauses et de prendre du recul. Et dans ce cas, autant assumer de s’offrir de vraies vacances d’écriture, c’est moins culpabilisant !
Bonjour Elodie.
Ah, la procrastination… cela me rappelle ma première année de thèse où j’ai découvert ce mot.
Je trouve ton article très sympathique. Sinon bravo pour avoir créer ton blog.
Ça faisait presque un an que l’idée d’un blog me titillait, mais j’avoue que je m’amuse plus que ce que j’imaginais en écrivant mes articles.
J’espère que tu vas bien, depuis tout ce temps !